Les ingénieurs et les scientifiques
de la région Île-de-France
 
 
 
 
 

IESF National Qui était Albert Caquot 1881-1976 ?

Alumni : ces réseaux d’influence trop souvent sous-estimés en France ?
 

 

5516EAD0-886B-4186-AA3F-374D5ED64CF2

 

Alumni : ces réseaux d’influence trop souvent sous-estimés en France ?

 

Paris – Juin 2025

 

Qu’ils soient diplômés de Polytechnique, de Sciences Po, de l’INSA, ou de l’Université de Strasbourg, tous partagent un point commun : ils peuvent être membres d’un réseau d’anciens élèves. Les alumni, comme on les appelle à l’anglo-saxonne, constituent un capital social puissant – et pourtant, en France, leur rôle reste ambigu, parfois minimisé, souvent mal structuré. Une comparaison avec les pays anglo-saxons et certains voisins européens met en lumière un paradoxe : la France forme des élites, mais investit peu dans leur mise en réseau.

 

 

Des associations centenaires mais éclatées

 

Les associations d’anciens élèves en France ne sont pas récentes. Polytechnique fonde la sienne dès 1865, HEC en 1883. Ces entités visent à maintenir le lien entre diplômés, soutenir les jeunes générations dans leur insertion professionnelle, organiser des événements et collecter des fonds pour les écoles. Pourtant, selon une étude de l’Observatoire des diplômés (2023), seulement 34 % des diplômés français restent en contact actif avec leur association d’alumni après cinq ans.

 

En cause ? Une multiplicité d’associations par école, parfois par promotion, un manque de mutualisation et un flou sur les missions. « On ne sait pas toujours si on est là pour lever des fonds, réseauter, ou juste organiser un dîner annuel », regrette un ancien président de l’association des anciens élèves d’une grande école d’ingénieur.


Et pourtant ! Depuis 1848 il existe en France une association qui fédère les Amumni : Les Ingénieurs et Scientifiques de France (IESF). De grande notoriété de fin XIX ( Gustave Eiffel en fut le président jusqu'au milieu du XX siècle (Albert Caquot en fût également le président), IESF souffre depuis d'un repli sur soit des différentes Alumni qui la composent. Trop peu d'événement intéressant l'ensemble du corps des Ingénieurs y sont organisés. Chacune des Alumni préférant les organiser en interne.

 

 

L’exemple américain : Harvard, une puissance à part entière

 

À Harvard, Stanford ou Princeton, les associations d’alumni sont des institutions en soi. Harvard Alumni Association revendique plus de 400 000 membres actifs, dispose de bureaux dans plus de 70 pays, et gère des dons à hauteur de plus de 1,5 milliard de dollars par an. Ces fonds servent à financer bourses, recherches et infrastructures. Le réseau est aussi un levier politique et économique majeur : Barack Obama, Mark Zuckerberg ou encore Sheryl Sandberg ont su en tirer parti.

 

Les universités américaines ont fait des Alumni un pilier stratégique. Leur influence s’étend au-delà de la sphère académique : nominations politiques, financements de start-up, lobbying législatif. Une culture du “give back” (retour à l’institution) profondément ancrée, et largement absente en France.

 

 

En Europe : le modèle britannique et l’émergence allemande

 

Au Royaume-Uni, les universités d’Oxford ou de Cambridge ont calqué en partie le modèle américain. L’université d’Oxford a levé plus de 3 milliards de livres en dix ans, en grande partie grâce à ses alumni. L’esprit communautaire et le prestige jouent un rôle clé.

 

En Allemagne, les universités publiques n’ont historiquement pas de culture alumni forte, mais des initiatives se développent, notamment autour des universités d’excellence (TU Munich, Heidelberg…). Les réseaux d’anciens élèves de certaines Fachhochschulen (écoles d’ingénierie appliquée) montent en puissance grâce à des plateformes numériques professionnelles.

 

 

En France : du potentiel, mais une culture à construire

 

Selon un rapport de France Alumni (MAE, 2022), le réseau des diplômés internationaux des établissements français est estimé à plus de 350 000 personnes dans le monde. Pourtant, les moyens restent faibles : peu de plateformes centralisées, des budgets réduits, une articulation fragile avec les établissements d’origine.

 

« On a un problème culturel avec la réussite et le sentiment d’appartenance », analyse la sociologue Monique Dagnaud. « L’élitisme est mal vu, et l’idée d’un réseau d’influence peut paraître suspecte. »

 

Dans les universités, la question est encore plus sensible. La réforme LRU de 2007 encourageait la professionnalisation des services alumni, mais l’écart reste important entre universités et grandes écoles. Beaucoup de diplômés ignorent jusqu’à l’existence de leur réseau.

 

 

Influence dans la société : sous-estimée ou occultée ?

 

Les réseaux alumni jouent pourtant un rôle stratégique, notamment dans les sphères économique, politique et médiatique. Un rapport de Transparency France (2021) relevait que plus de 65 % des dirigeants du CAC 40 sont issus de moins de dix établissements, et que leurs associations d’anciens sont souvent des lieux de pouvoir feutré. Cela pose la question d’un entre-soi difficile à percevoir de l’extérieur.

 

Mais à l’inverse, leur capacité à influencer les politiques publiques, à mobiliser pour l’innovation ou à contribuer à l’attractivité des écoles reste largement sous-utilisée. « Si on avait une vraie fédération nationale des alumni avec un rôle de think tank, ce serait une force formidable », estime Florence Lutin, membre du comité scientifique d’un groupe de réflexion industriel.

 

 

Vers une réforme nécessaire ?

 

Des pistes existent. Certaines écoles mutualisent leurs bases de données via la plateforme Join Lion, d’autres s’appuient sur LinkedIn Alumni pour structurer des communautés professionnelles. L’initiative France Alumni+ tente d’agréger les anciens élèves étrangers des établissements français, avec des succès limités.

 

Une réforme serait possible autour de trois axes :

 

  1. Structuration fédérative (type Conférence des Alumni).
  2. Professionnalisation des équipes de gestion.
  3. Valorisation fiscale et symbolique du don d’anciens élèves.

 

Conclusion

 

Le réseau alumni français est un géant endormi. Doté d’un vivier exceptionnel, il manque encore d’unité, de stratégie et de reconnaissance. Face à la montée en puissance des modèles anglo-saxons et à l’internationalisation des élites, il y a urgence à réveiller ce capital latent. Car les anciens élèves ne sont pas qu’un souvenir de promo : ce sont des vecteurs d’influence, de financement, et de rayonnement.

 

 

Références

 

  • France Alumni, Ministère de l’Europe et des Affaires étrangères (2022) : www.francealumni.fr
  • Observatoire des diplômés, enquête 2023
  • Transparency International France, Rapport « Élites et Réseaux », 2021
  • Harvard University Development Office, Annual Report 2023
  • Interview de Florence Lutin, 2025
  • Ingénieurs et Scientifiques de France : www.iesf.fr 

 

 

 

 

 

Retour

 

Partenaires

Association Nationale des Docteurs
Association Nationale des Docteurs
Alumni EIDD
Alumni EIDD
MGEU
MGEU