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Petit déjeuner du 17/01/2019- Gérard Mourou : un Nobel sous haute intensité. Avec Jean-Paul Pocholle  Actualités Note de lecture : L'histoire des industries d'optiques françaises vues à travers l'histoire de BBT

Vous avez dit "Economie Bleue" ?
 

La terre une planète bleue ? Cette question ne se pose même plus, toutes les photos satellite le montrent. Mais qui sait que 70% de la surface de la terre est couverte par les mers et océans, que 80% de la population mondiale habite à moins de 500 km des côtes (et ce chiffre ne fait qu’augmenter) ?  Le commerce international (10 milliards de tonnes) est assuré à 95% par la voie maritime. C’est le mode de transport le moins polluant (3 fois moins que la route et 15 fois moins que l’avion) et le plus économique. Pour transporter 100 000 tonnes de marchandise un bateau suffit mais il faut au moins 1000 avions. Le chiffre d’affaire de cette économie est de 1 500 milliards de dollars et devrait doubler d’ici à 2030. L’emploi maritime passera de près de 31 millions d’équivalents temps plein en 2010 à 40 millions en 2025.

 

La France, un pays maritime ? Assurément oui mais qui en a vraiment conscience ? Et pourtant elle dispose de 11,5 millions de kilomètres carrés d’espaces maritimes (la deuxième place derrière les Etats Unis et juste devant l’Australie) ; elle a 3500 km de côte en France métropolitaine (et 20 000 km en tenant compte de l’outre-mer). Historiquement ces atouts n’ont pas été valorisés et la France a gardé pendant longtemps une mentalité de terroirs et un esprit paysan. Alors que les pays d’Europe et principalement ceux du Nord, développaient très tôt une vision maritime mondiale (souvenons-nous des compagnies des Indes !) et une marine de guerre répondant à leurs ambitions, la France se débattait dans des querelles terrestres et très européennes. Même le grand empire colonial français n’a pas réveillé de véritable fibre maritime chez nos concitoyens. Il a fallu attendre l’après-guerre pour voir apparaître une pulsion maritime française et encore est-elle incomparable avec   celle que la Chine montre depuis une dizaine d’année.  Le résultat est une économie maritime française qui pèse 76 milliards d’euros (2,5% du PIB français ce qui est bien faible !) et gère 306 000 emplois directs (1% des emplois maritimes dans le monde).

 

Quels sont les atouts de la France en économie bleue et quels en sont les freins ?

 

Les atouts sont nombreux et mal connus.

 

Outre les conditions géographiques qui permettent à la France d’être présente sur la plupart des mers et océans, une industrie diversifiée couvre tout le spectre de l’innovation, de la recherche, de la production et de la commercialisation. Sans être exhaustif, on peut citer :

 

Le transport maritime dont la valeur de production est une des plus élevée dans cette économie avec 14 Milliards d’euros. CMA CGM est une des plus grandes compagnies mondiales, mais on peut aussi citer Louis Dreyfus armateur, Bourbon…

 

Le nautisme et la plaisance qui emploie 40 000 personnes et fait 77% de son chiffre d’affaires à l’exportation

 

La construction navale avec 9 milliards d’euros de production et qui fournit 42 000 emplois directs.Les chantiers de l’Atlantique, DCNs, CNM… sont des acteurs de premier plan de ce domaine.

 

Les produits de la mer et les biotechnologies, secteur qui emploie le plus de personnes (64 000) et qui est très actif dans l’innovation

 

Sans oublier l’off shore pétrolier (18 Milliards d’euros), le tourisme, la défense, les ports, la recherche scientifique et océanographique, les énergies marines renouvelables, les services…

 

 

 

Les freins au développement de l’économie maritime

Ils sont à la fois psychologiques, politiques et financiers.

 

 Comme on l’a déjà évoqué, la France a une vocation maritime qu’elle a longtemps ignorée. Grâce à l’action d’organisations tournées vers la mer, elle commence à en prendre conscience. Notre pays dispose de 11 millions de kilomètres carré d’espace maritime mais on peut s’interroger pour savoir ce que les gouvernements successifs veulent en faire ! Pour cela, et dans un premier temps, la politique ultra marine mériterait d’être mieux définie et financée de façon pérenne, et cela ne concerne pas seulement la Polynésie,  les Antilles, la Guyane, la Nouvelle Calédonie ou la Réunion, mais aussi toutes les îles et territoires attribués à la France !

 

Toujours dans le domaine du politique, il faut signaler les difficultés de coordination entre l’état central et les pouvoirs régionaux sur le développement du littoral et de l’arrière-pays. Sont concernés en priorité les ports français. Ils sont généralement bien équipés mais quand même peu compétitifs, en termes de flux de marchandises traité, par rapport aux grand ports européens. Ils souffrent d’un déficit d’infrastructures ferroviaires et fluviales qui ne facilite pas l’évacuation des flux de marchandise vers ou à partir des ports. Sans aller jusqu’en Chine et notamment à Shanghaï, nous avons bien des exemples en Europe (Rotterdam, Anvers…) de ce qu’il faudrait faire !

 

Il convient aussi d’évoquer les atermoiements politiques sur les choses de la mer. A titre d’exemple, les énergies renouvelables « marine » donnent lieu à des ordres et contre ordres des différents gouvernements, associés aux valses hésitations des industriels à se lancer dans ce secteur. Un retard important dans l’éolien en mer posé, des grandes incertitudes sur l’éolien flottant, un retrait de l’hydrolien en sont les conséquences et il serait grand temps que le cap en ce domaine soit fixé et tenu en dépit des pressions des autres acteurs de l’énergie.

 

Enfin, la communication sur les activités maritimes est plutôt déficiente. Elle se concentre sur la biodiversité marine qui, il faut le reconnaître, est source d’images superbes mais pas forcément motivante pour convaincre l’opinion publique de l’importance des mers et océans. La pollution des océans avec le côté sensationnel du sixième continent de plastiques et du pavillon bleu des plages, les impacts du réchauffement climatiques et notamment la force des ouragans ne donnent pas une image positive du milieu maritime, bras armé de la mondialisation que tout le monde rejette mais dont tout le monde profite ! Il serait temps que le monde maritime cherche à donner de ses activités une vision plus réaliste, concrète et convaincante qui emporte l’adhésion de l’opinion publique.

 

 

La France a des atouts indéniables pour exploiter les richesses de la mer. Sa population doit être convaincue que la mer est l’espace de développement du futur. Ce devrait être l’action de tous les acteurs du monde maritime qui doivent faire preuve d’opiniâtreté, d’imagination et de capacité de lobbying. Une telle population obligera les dirigeants à s’ouvrir vers le large et conduira vers une « révolution maritime ».  Celle-ci sera à l’origine d’une évolution industrielle, commerciale et donc bénéfique à l’emploi et à la préservation de l’humanité, à condition qu’elle s’accompagne d’une gestion plus efficace mais aussi plus écologique des espaces marins, du littoral et de l’interface terre/mer.

 

 

Luc Uzan

données du Cluster Maritime français

http://www.cluster-maritime.fr/

 

 

 

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